liminaire
Pierre A. Collet
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La nouvelle de la démission du pape Benoît XVI semble faire l’unanimité : il a bien fait. Tous n’énoncent évidemment pas les mêmes raisons pour se réjouir de l’événement, beaucoup se contentant de reconnaître le côté très humain de la décision : et c’est clair, le fait qu’il ne s’accroche pas au pouvoir, comme d’autres ont pu le faire, ne peut que donner une impression positive. Ce geste permet en outre qu’on soit enfin autorisé à distinguer un peu plus clairement la personne de sa fonction, et donc à relativiser en quelque sorte cette dernière : c'est un pas dans une bonne direction.
Quoi qu’il en soit de la sympathie ponctuelle ainsi générée, les catholiques n’ont pourtant pas oublié les effets désastreux de l’action de Joseph Ratzinger à Rome, en particulier toutes ses enquêtes et ses condamnations durant ses 25 années à la tête de la Congrégation de la Doctrine de la Foi, mais aussi ses propositions avortées de restauration de l’unité en direction des seuls traditionnalistes lefebvristes : ses reniements en matière de réforme liturgique n’ont pas suffi à les convaincre au plan théologique. Un lourd échec pour le pape théologien. Et si l’on n’avait un peu le sentiment de tirer sur l’ambulance, il faudrait encore citer sa toute dernière désignation au moment où il suggérait de « réorienter l’Église », la nomination d’un ami marchand d’armes, von Freyberg, à la tête de la Banque du Vatican…
L’événement aura en plus cette conséquence bénéfique, celle de donner lieu à des prises de position qui permettront à certains de « sortir du bois », de nous situer les uns et les autres, d’en réveiller quelques-uns qui y croyaient de moins de moins. Parmi les nombreux communiqués publiés ces jours-ci, contentons-nous de citer ceux qui nous sont plus proches : les Réseaux des Parvis, IMWAC, les communautés de base italiennes, les prêtres mariés allemands, nos amis espagnols du Moceop et des cdb, et en Belgique le CIL.
Et de revenir peut-être à quelques fondamentaux, comme le fait bien Leonardo Boff dans sa dernière chronique : voulons-nous continuer à défendre une Église du « témoignage » – une Église qui détient le dépôt de la foi et qui vient l’offrir aux autres qui, sans elle, ne peuvent rien – ou une Église du « dialogue » qui accepterait enfin, humblement, de marcher avec les autres convictions vers une vérité jamais atteinte… ? Ou encore, comme l'exprime plus modestement José M. Castillo, « le problème ce n’est pas le pape, c’est la papauté ».
Ce premier « pas de côté » aura-t-il des suites… ? Nul ne peut le prédire aujourd’hui. Du côté des autorités, on nous ressasse à l’envi que l’avenir est entre les mains du Saint-Esprit (et d’une centaine de cardinaux, quand même…). Soit. Et évidemment pas dans nos mains à nous. C’est à cette soi-disant évidence que s’attaque Ivone Gebara dans ce texte que nous avons choisi comme guide. Si nous nous sentons concernés par l’avenir du christianisme – disons de la Bonne Nouvelle de Jésus… – peut-être devrions-nous trouver les moyens de faire savoir « à qui de droit » ce que nous attendons ? Gabriel Ringlet suggérait dimanche sur la RTBF de faire savoir nos priorités à notre électeur, le cardinal Danneels. Par exemple. Mais c’est à nous, à nos communautés, d’inventer les moyens de nous faire entendre. Croyons-y encore une fois !
Pierre A. Collet (Réseau PAVÉS)