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P’tits Belges, signez comme les p’tits Suisses

Jean-Marie Culot
Publié dans HLM n°151 (3/2018)

Bienfait de l’amitié : une communication de Paul nous signale une pétition lancée par deux citoyens suisses, exhumée par le site Enfants du silence, enfants de prêtres[1] – que nous saluons à cette occasion. Cette initiative qui date en fait de 2010 souhaitait « un engagement de la Conférence épiscopale pour que la possibilité d’ordonner des ‘viri probati’ soit étudiée activement et positivement tant en Suisse qu’au Vatican ». Elle était accompagnée d’un intéressant argumentaire sur la pénurie de prêtres, la raréfaction des célébrations eucharistiques, la disponibilité des gens mariés, la relativité de la loi du célibat, la comparaison avec les protestants voisins, l’appel au débat et à la réflexion[2]. Pour les 1000 signatures attendues, il y en eut 2538, remises à Mgr Brunner, président de la Conférence. Point, c’est tout, fin de l’histoire. Grand silence. Belle histoire ! je dirais.

J’aime cette manière des Suisses, leurs salves de ‘votations’, leur entête-ment à recueillir leurs opinions, à tenter de les respecter, et notamment cette entreprise des deux animateurs de communautés (ingénieurs, diacres mariés) d’instruire les pasteurs des souhaits de leurs ouailles.

J’aime la stratégie (les deux initiateurs sont parlementaires jurassiens par ailleurs) : ceci n’est pas une pétition (que l’Église n’aille pas croire que nous la considérons comme une démocratie !), c’est juste un recueil de signatures, juste une proposition d’aide à une hiérarchie que l’on salue comme seule à la manœuvre. Ce n’est pas une tentative de révolution, juste la demande d’une retouche sur la question du célibat ! Mais caramba ! toutes les stratégies ne réussissent pas, même les plus prudentes !

J’aime le résultat, très au-delà de l’escompté et révélant l’intérêt indéniable de la population de quelques paroisses pour une question qui aurait pu être jugée passablement exotique et sans enjeu[3]. Il existerait donc une opinion catho, mais en panne de canaux d’expression.

J’aime la réponse de la hiérarchie. Parfaite. « La question de la célébration de l’eucharistie est intimement liée au sacerdoce. C’est pourquoi […] nous portons, nous aussi, le souci de nouvelles vocations sacerdotales. Nous faisons tout notre possible pour éveiller et favoriser de nouvelles vocations. Et nous nous préoccupons aussi de faire évoluer les conditions d’admission au sacerdoce. » Parfait exemple d’un blocage théologique (lien ‘intime’ de l’eucharistie et du sacerdoce[4], forcément … bêta-bloquant) et pastoral (il nous faut toujours des vocations en format tridentin même si personne n’en veut plus), du blocage d’un système dont on n’a à attendre ni refondation théologique ni recherche d’adéquation à la culture contemporaine. Annonce d’une mort prochaine, de l’agonie en cours, formulée avec une onction extrême : « Nous sommes conscients que nous n’obtiendrons pas de réponse à une question aussi difficile dans un proche avenir, mais nous porterons ce souci aussi à l’avenir. » Puis Grand et Saint Silence. Sainte Rita, priez pour nous !

Conclusion ? Exprimons-nous, réfléchissons, débattons, pétitionnons, signons à l’exemple des catholiques jurassiens, faisons émerger le sensus fidelium, favorisons l’émergence d’une opinion publique catholique. Pour aider à la déconstruction du système, au recentrage sur l’essentiel, à l’abandon de toutes les sacralisations, à un profond remaniement des ministères[5], à une prise en compte de la soif de nos contemporains.


Jean-Marie Culot (Hors-les-murs)

Notes :

[1] https://enfantsdusilenceblog.wordpress.com/2018/01/08/petition-pour-lordination-presbyterale-dhommes-maries-source-jura-suisse/
[2] Dans un commentaire par courrier, Jean-Paul Miserez, l’un des initiateurs, fait part de ce sentiment : « Pour ma part, je suis depuis longtemps choqué, et même vexé, par le peu de considération que l’Église porte aux couples et aux personnes mariées (très peu de saints mariés sauf quand ils ont quitté leur famille ; Nicolas de Flue), exigence de l’âge de 25 ans pour ordonner un prêtre et de 35 ans pour ordonner un diacre marié, interdiction de remariage pour un diacre devenu veuf, etc. » Plus loin, il déclare avec force : « Mais surtout, je suis convaincu que chaque chrétien a un devoir de participer à la vie de son Église, selon ses charismes. »
[3]  J.P. Miserez mentionne que les signataires « remercient souvent de la démarche ; elles regrettent régulièrement que l’on n’aille pas plus loin en demandant aussi le mariage des prêtres et l’ordination des femmes. Plusieurs prêtres ont aussi signé. »
[4]  Car il y aurait eucharistie lorsqu’un prêtre célèbre seul dans une chapelle et pas lorsque cent cinquante chrétiens font mémoire de Jésus, en Esprit et vérité, se partageant sa parole et son pain, et en présence ou non d’un prêtre ! Les services ministériels, reconnus et compétents, sont nécessaires dans les communautés, mais Jésus n’avait pas souhaité de sacralisation ni des gestes, ni des lieux ni des personnes.
[5]  Une initiative de l’épiscopat brésilien est prochainement attendue quant à l’ordination d’animateurs de communautés en Amazonie.



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