Publications

Rechercher les articles
par mot du titre ou mot-clé :

présentés par :

année et n° (si revue):

auteur :

Mise au point au sujet du célibat des prêtres

Charles Delhez
Cet article n'a pas été publié dans une de nos revues

Dans ma lettre ouverte au Pape (que je lui ai fait parvenir), je voulais en rester à une supplique. Dans l’avion, en effet, François laissait entendre qu’il pouvait y avoir des exceptions dans les pays en manque important de prêtres, un état de nécessité, comme on dit en droit. Il citait les îles du Pacifique. Notre pays connaît aussi cette situation et je souhaitais la lui faire connaître. Rien ne semble en effet indiquer un redressement de la courbe drastiquement descendante des vocations classiques dans notre pays. Deux entrées au séminaire en francophonie cette année, 3 séminaristes pour les 7 ans de formation sacerdotale à Malines-Bruxelles, et 4 à Liège…

Mon souci était la permanence du geste eucharistique pour les communautés chrétiennes. Celui-ci est une des quatre activités de la première communauté chrétienne décrite dans le Nouveau Testament : l’enseignement des apôtres, la communion matérielle et spirituelle, la Cène (la Fraction du pain, le geste eucharistique) et la prière (voir ci-dessous). Il ne s’agit donc pas de renforcer la hiérarchie et la structure verticale de l’Église, mais de permettre aux communautés chrétiennes des villages oubliés de refaire ce geste en mémoire de Jésus car, pour un catholique, il est fondateur de toute communauté. Et je ne crois pas que l’apport de prêtres étrangers soit la solution, même si certains ont un réel rayonnement. Pourra-t-on entendre l’appel de toutes ces communautés que l’on a laissé mourir, surtout dans les campagnes, les villes étant privilégiées ? Mais loin de moi, bien sûr, de réduire la vie chrétienne à la messe du dimanche…

Entendrons-nous donc l’appel des communautés abandonnées, mais aussi celui des prêtres ? Quand il y en a plusieurs pour une grande paroisse urbaine, il n’y a évidemment pas de problème, mais quand il faut, le week-end, aller de communauté en communauté, sans avoir le temps de saluer les fidèles, quand on a plusieurs clochers sous sa responsabilité… Si l’on veut préserver la beauté du célibat, il ne faut pas user et abuser de la disponibilité du célibataire au détriment des relations personnelles et de sa vie de prière. Le célibat n’est pas une question d’agenda, mais de cœur. En passant, je m’interroge sur le soutien de certains jeunes chrétiens au célibat de leurs prêtres. Si cette vocation est si belle (ce que je crois), pourquoi sont-ils si peu nombreux à l’entendre ? Dieu serait-il devenu muet ou bien nous envoie-t-il des signes depuis des années, mais que nous ne voulons pas comprendre ?

Un double clergé ?

En termes techniques, il s’agit de l’ordination des viri probati, de personnes dont la maturité a été éprouvée. Dans ce cas de figure, il ne s’agirait plus d’être prêtre dès le plus jeune âge (c’est d’ailleurs de moins en moins fréquent), mais, à un moment donné, d’être choisi par la communauté. Celui qui préside à tous doit être élu par tous, disait le pape saint Léon. On retrouverait ainsi le sens profond du mot presbuteros, en grec : l’ancien. C’est vers la quarantaine ou cinquantaine, en effet, que l’on serait appelé à ce service – bénévole ou à charge de la communauté –, après avoir mené à bien sa vie conjugale, familiale, professionnelle. La personne élue sera présentée à l’évêque qui confirmera ce choix en lui imposant les mains. (Il faudra bien sûr veiller à mettre en place de nouvelles filières de formation, sans doute allégées.)

Il ne s’agit pas de supprimer le célibat, mais d’accueillir plusieurs manières de vivre ce ministère ordonné. L’évêque Fritz Lobinger, cité par le Pape dans l’avion, plaide pour une mise en place de deux clergés : l’un « corinthien » (selon le modèle pratiqué par saint Paul dans les communautés qu’il fondait), à temps partiel, issu de la communauté et reconnu par la hiérarchie, pour animer la fraternité et présider l’eucharistie, sans être soumis à la loi du célibat ; l’autre « paulinien », engagé dans le célibat, œuvrant à temps plein pour conduire les communautés à l’état adulte, faire le lien entre elles, former et animer les prêtres de communauté. J’avoue être séduit.

Une Église sans cesse à réformer

Les temps ont bien changé depuis le début du millénaire passé où l’Église latine (une partie de l’Église catholique, donc) a institué le célibat comme condition pour l’ordination. L’Église pourrait-elle traverser tous ces changements sans se réformer ? Tel n’était pas l’objet de mon article, mais telle est bien ma préoccupation depuis longtemps. Une des lectrices l’a bien exprimé : Repenser en profondeur, avec l'aide de l'Esprit Saint, le fonctionnement de nos paroisses, de nos diocèses et plus largement même de notre Eglise universelle, en réfléchissant à la place du prêtre et du laïc me semble être plus rude comme travail, mais aussi plus fructueux pour le chemin de sainteté de notre Église... Ou encore ce lecteur : La vraie attente des chrétiens du XXIe siècle n’est-ce pas plutôt : la participation, la cogestion, l’égalité, la non-discrimination entre ‘simples’ baptisés et baptisés ordonnés… ? Et de citer le théologie Yves Congar : « Tout ce qui concerne les chrétiens devrait être décidé avec eux. » Beaucoup de lettres que je reçois pour le moment (quel courrier !) vont dans ce sens, qui est aussi le mien.

En attendant, je suis d’accord avec tous ceux qui disent que le véritable problème est celui de la vitalité de notre vie chrétienne. Et là, il y a place pour la conversion de chacun, prêtre ou laïc.

8 février 2019

Charles Delhez


webdesign bien à vous / © pavés. tous droits réservés / contact : info@paves-reseau.be

Chrétiens en Route, Communautés de base, Démocratie dans l'Eglise, Evangile sans frontières, Hors-les-murs HLM, Mouvement Chrétien pour la Paix MCP, Pavés Hainaut Occidental, Sonalux