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En mémoire de Pierre de Locht

Hommage de Josef De Kesel, évêque auxiliaire

Josef De Kesel
Publié dans Bulletin PAVÉS n°11 (6/2007)

 

Pierre, le chanoine de Locht, s'est éteint paisiblement, de façon inattendue. J'ai été tout de suite averti qu'il était mourant. Quand je suis arrivé ici à Bruxelles comme évêque auxiliaire, fin mai 2002, je ne le connaissais que de nom, par ses écrits, par ses prises de position. Je me rappelle encore très bien que, déjà au mois d'août de cette année, il est venu me voir. On s'est parlé longuement. C'étaient encore les vacances. Il m'a raconté son parcours, sa vie, ses convictions, ses joies. Aussi ses blessures et ses déceptions. Ce ne fut pas sa dernière visite. On s'est vu assez régulièrement. Il venait me voir; moi j'allais chez lui. La dernière fois c'était en janvier, chez lui, le soir, autour d'un bon repas, préparé par Suzanne. C'est devenu mon dernier souvenir. Il était très détendu et me parlait de ses nombreux pèlerinages en Terre Sainte. Ce souvenir me restera précieux : un homme heureux, très sensible, d'un regard si doux, d'une grande humanité. Je sais que l'Église l'a fait souffrir. L'espérance que le Concile Vatican Il avait suscitée ne s'est pas réalisée comme il l'avait espéré. Les années après le Concile ont été difficiles, bouleversantes. Il en a subi les conséquences. Mais son cœur ne s'est pas endurci. Il est resté fidèle. Fidèle à lui-même, libre et ouvert aux questionnements de l'homme d'aujourd'hui. Fidèle à l'évangile et, je peux le dire et je pense que je dois le dire, fidèle à cette même Église, peuple de Dieu, toujours respectueux aussi en profondeur vis-à-vis de ceux qui y exercent le service de l'autorité.

Si aujourd'hui le monde prend ses distances vis-à-vis de l'Église, l'Église de son côté ne peut pas faire de même vis-à-vis du monde en lui devenant étrangère. Ce monde est créature de Dieu. C'est ce monde qu'Il a aimé jusqu'au bout en lui donnant son Fils, Lui qui n'est pas venu pour condamner mais pour sauver et donner la vie. C'est cette ouverture au monde que Pierre a toujours cherchée, à ce monde sécularisé et pluraliste, solidaire avec tous ceux et celles qui posent des questions et qui sont en recherche. Je rends grâce à Dieu pour Pierre : pour tout ce qu'il a été et pour tout ce qu'il nous a donné comme homme, comme chrétien et comme prêtre. Dans son dernier livre, qu'il m'a encore offert, il dit que le charisme spécifique de la foi chrétienne, ce n'est ni une morale ni même une spiritualité, mais une alliance, la présence d'une Transcendance qui est à la fois extérieure et si intime à la condition humaine. Et il aimait de parler de ce mystère, non comme une vérité qu'on nous cache, mais comme 'une lumière trop vive pour nos yeux'. Voilà ma prière, du fond de mon cœur, et la prière de toute notre Église : que Dieu lui montre cette lumière et la clarté de son visage. Et qu'Il le garde pour toujours dans son amour.

Josef De Kesel


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