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Faut-il un prêtre pour qu'il y ait une messe ? Réaction.

Jean Kamp
Cet article n'a pas été publié dans une de nos revues

Faut-il un prêtre pour qu'il y ait une messe ?
La difficile sortie d'un catholicisme magique [1]


En parcourant le dernier numéro de HLM cette question-titre m'a frappé d'étonnement et ce non par son contenu ou sa formulation, mais par ... son nombre : il n'y a là qu'une question, une seule !? alors que pareille question me paraissait en impliquer immédiatement nombre d'autres, infiniment plus fondamentales : faut-il encore des prêtres? et, en plus, faut-il encore des messes? Ou, plus radicalement , faut-il encore une (ou des) religion(s) institutionnalisée(s) ? comme p. ex. le catholicisme, qui a été – et reste provisoirement encore – un peu la nôtre?

Ce qui me paraît également assez étonnant est le fait que l'auteur de l'article, G. Fourez, semble s'étonner de ce que beaucoup de catholiques ont eu – et ont encore – une conception assez magique du rôle du prêtre [2]. Mais comment s'en étonner ? Tout le système de la religion et de la théologie catholiques est basé sur ce phénomène éminemment 'magique' que sont le miracle et le miraculeux, jusqu'à y inclure la personne même de Jésus, présenté comme un être éminemment 'miraculeux' et ce non seulement dans ces actes (les miracles qu'il aurait accomplis) mais, plus fondamentalement encore, dans sa personne : il nous a été présenté comme le Fils et le Verbe du Père éternel, né d'une vierge elle-même fécondée par l'Esprit-Saint et exempté de ce fait du péché originel et des traumatismes que ce péché entraîne. Comment peut-on, dans ces conditions radicalement exceptionnelles, être présenté au monde comme un 'exemple' à suivre ou à imiter par une humanité blessée (nous a-t-on dit) par cette catastrophique tare originelle ? D'autre part il n'est peut-être pas inutile de rappeler que ce ne sont pas les premiers chrétiens qui ont divinisé et 'miraculisé' Jésus : ce sont les évangélistes d'abord et saint Paul, avant que l'empereur Constantin ne l'ait fait officiellement au concile de Nicée, et ce malgré une majorité arienne des évêques présents à ce Concile.

Or, me semble-t-il, on ne peut fonder des vérités essentielles ni l'essentiel tout court sur l'exceptionnel. C'est la ‘théologisation’ et, indirectement, la 'politisation' de la personne de Jésus qui en ont fait un thaumaturge et fait, de sa personne et de son message, une religion théorique ou, pire, théologique et, de ce fait, 'savante' : axée sur un savoir. On n'a pas conduit au bûcher les orgueilleux et les nantis : on y a conduit les 'hérétiques'. Ainsi ce qui tue (ou gauchit terriblement) la véritable dimension authentiquement religieuse du message évangélique ce sont, paradoxalement, les 'religions' et les théoriciens des religions ainsi que les détenteurs du 'pouvoir' religieux. Ce sont eux qui ont transformé et déformé l'essentiel du message de Jésus – sa dimension révolutionnaire – ­en un savoir : en une série de 'vérités' auxquelles il fallait (et il faut en principe toujours) adhérer, – et refuser cette adhésion c'est devenir un hérétique : c'est-à-dire non seulement un mal-faisant mais, pire, un mal-pensant.

Ce qui importe aujourd'hui – face à la crise profonde – voire radicale – dans laquelle nous nous débattons, est de redécouvrir le véritable sens du 'religieux'. Nos dirigeants religieux (papes, évêques, théologiens) nous parlent si souvent de la foi et de 'professions' de foi. Mais je constate que, aujourd'hui, ils se gardent bien de préciser quel est, encore actuellement, l'objet de cette foi : ce sur quoi elle porte. À entendre encore le Credo aujourd'hui, elle porte d'abord sur des vérités qui nous viendraient d'une 'Révélation' divine, et donc d'un savoir de – et d'une adhésion à –ces vérités. Nulle part le Credo catholique ne fait allusion à la charité. Or il me semble que le vrai 'noyau' du 'religieux' est d'abord d'ordre éthique (quelque désagréable et démodé que puisse paraître ce mot). Le 'religieux' (ou : la dimension religieuse) consiste essentiellement en une attitude concrète, pratique, journalière, faite d'agir et d'actions – d'actes humbles, fidèles, généreux : c'est une attitude faite de solidarité (de 'communion' , de partage, de respect) envers ... tout : les hommes et les femmes qui nous entourent, leurs joies, leurs misères, leurs épreuves. C'est une communion aussi avec l'Univers qui nous porte, la nature qui nous fait vivre et dont nous connaissons mieux aujourd'hui qu'hier l'extraordinaire splendeur, mais également la fragilité. La vraie religion est une attitude de communion au Monde dans lequel nous vivons : à sa dignité, sa grandeur, ses misères. Et ce non par le truchement d'hosties, mais en 'communiant' (c'est-à-dire en participant activant, généreusement – voire onéreusement) aux joies mais d'abord peut-être aux souffrances et aux pénuries – et à la faim ... – du Monde et de tant d'enfants perdus, abandonnés, égarés, de par ce Monde. Bref : être généreux, attentifs, ouverts à tout ce qui nous entoure, – et avec ou sans prêtres.




Jean Kamp

Notes :
[1] Cfr HLM n° 110 décembre 2007 pp. 32 - 40
[2] p. 28

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