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Absence, silence, indifférence… : "la base" face à "l’institution"

Après la journée PAVÉS du 13 avril 2008

Pierre Collet
Cet article n'a pas été publié dans une de nos revues

Paroisse du Saint Curé d’Ars à Forest, 13 avril 2008. Nous n’étions pas très nombreux à avoir répondu à l’invitation de Démocratie dans l’Église et du réseau PAVÉS pour venir échanger sur "le profil d’évêque" que nous souhaitons à la prochaine succession du cardinal Danneels… N’empêche : le débat a eu lieu et n’a pas manqué d’intérêt ! En voici donc quelques échos, ainsi que du courrier reçu à cette occasion de personnes qui ne pouvaient participer physiquement…

Et d’abord la bonne surprise d’accueillir Frédéric Antoine, rédacteur en chef de L’Appel, qui nous donne ses premières impressions après le sondage réalisé par son mensuel. C’est la troisième fois que L’Appel se lance dans une enquête, après celle de 2002 concernant "Un avenir pour l’Eglise ?" et celle de 2005 "Messages pour un futur pape", et F.A. nous rappelle qu’il s’agit bien là d’un travail d’information, et non de "militance"… Par respect pour son travail, nous renvoyons à ce qui sera publié dans le prochain numéro du magazine, ces jours-ci : bonne occasion pour ceux qui ne le sont pas de s’abonner à cet excellent média.

Mais relayons quand même cette remarque de Frédéric Antoine. Si L’Appel s’est ainsi lancé dans l’aventure des enquêtes d’opinion auprès des catholiques belges, c’est d’abord parce que personne d’autre n’en prend plus l’initiative… Se désintéresserait-on à ce point de ce que pense "la base" ? Aurait-on peur de ce qu’elle pourrait révéler ? N’a-t-on surtout pas envie de devoir éventuellement lui "rendre des comptes" …? Et de préciser que, en l’absence d’un fonctionnement démocratique – voire seulement "consultatif" qui semble de plus en plus négligé – il y a quand même une instance qui devrait se préoccuper de la chose et qui ne le fait pas, c’est le CIL, le Conseil Interdiocésain des Laïcs…

Comme il fallait s’y attendre, les échanges ont pris toutes les directions que le "cumul de fonctions" de notre évêque, archevêque et cardinal induit nécessairement… Sans oublier la dimension "politique" qui est aujourd’hui plus sensible que jamais : qu’on le veuille ou non, ce dont on parle ici concerne au moins autant la dimension "institutionnelle" de l’Église que ses choix pastoraux, et les difficultés de ré-accorder la Belgique aux plans culturel, socio-économique et politique ne sont jamais bien loin. C’est particulièrement perçu par les Bruxellois qui n’ont pas tous apprécié de manière unanime les restructurations pastorales récentes. On lira en annexe 1 l’avis motivé d’un prêtre de Bruxelles. Mais aussi par certains Wallons du Brabant et d’ailleurs qui militent depuis longtemps pour une plus grande autonomie, par exemple dans le mouvement Église-Wallonie. (voir p.ex. annexe 3 et l’article de C. Laporte dans La Libre du 4 décembre). Certains prédisent dès lors que la succession de G. Danneels ne serait pas effective avant longtemps, le temps que les institutions politiques belges retrouvent un minimum de stabilité…

Cela ne devait pas nous empêcher de dire nos attentes et nos préoccupations sur d’autres plans, tant en ce qui concerne les priorités pastorales que le fonctionnement démocratique.

On insiste ainsi beaucoup pour que l’Église, même dans sa dimension institutionnelle, fasse davantage de place au cheminement, à l’évolution, au changement ; qu’elle favorise des communautés "apprenantes", c’est-à-dire en mouvement et en recherche. C’est tout un état d’esprit qui est visé, et il est clair que ce n’est pas n’importe quel évêque qui accepterait ce type de projet…

Une autre préoccupation assez proche relaie (entre autres) le document Kerk en Ambt des dominicains hollandais : si pour vivre notre foi, nous avons besoin d’une communauté, si c’est elle qui est première, nous attendons d’un évêque qu’il lui accorde toute priorité, qu’il la respecte dans son originalité et sa diversité, y compris dans l’accueil des ministres et des guides qu’elle se donne.

Quant à un éventuel fonctionnement "démocratique", plusieurs d’entre nous ont été très surpris d’entendre encore affirmer comme une évidence que "bien sûr, l’Église n’est pas une démocratie"… même si on s’empresse de compléter par un "mais…" ! Visiblement, la terminologie aurait besoin d’être clarifiée. On s’accorde en tout cas sans peine à constater et regretter un déficit croissant des habitudes de participation et le peu de souci des autorités à consulter les chrétiens "de base", ainsi que la disparition de beaucoup de "conseils" qui fleurissaient dans les années de l’après Vatican II… Déception, lassitude, frilosité, reprise en main… ? Mais sur le fond aussi, le débat est loin d’être clos : si certains sont prêts à accepter que l’Église ne soit pas une "démocratie", c’est à condition que tous admettent qu’elle n’est pas non plus une "monarchie", pas plus d’ailleurs qu’une "aristocratie", une "oligarchie", une "gérontocratie", ou une "androcratie"… Autrement dit qu’elle n’est pas un "pouvoir" alors que, visiblement, elle en garde encore bien des apparences…

S’agissant de pistes concrètes pour restaurer la confiance et les liens avec l’autorité, on évoque surtout la nécessité de prendre des risques : si nous n’en prenons pas, l’institution ne changera pas d’elle-même, elle n’évoluera pas. On pense particulièrement à des initiatives concernant l’égalité réelle entre hommes et femmes (voir annexe 2, mais aussi l’idée que cette discrimination met l’Église catholique dans l’illégalité, et que ce devrait être une raison pour lui contester le droit aux subsides publics…). On évoque l’ouverture œcuménique qu’il faudrait favoriser à tous niveaux, à commencer par des rencontres locales, et sans attendre les autorisations "doctrinales". Et pour ressusciter la participation, le groupe Démocratie dans l’Église annonce la circulation d’une lettre électronique mensuelle qui pourrait déboucher sur un forum de discussion , ouvert déjà sur le site de PAVÉS.

Voilà ! Vous avez la parole, prenez-la sans attendre que d’autres le fassent pour vous ! Et merci encore à nos hôtes de Forest et à tous les participants.

Pierre Collet

Annexes

1. Des qualités "politiques"…

Pour commencer, je propose qu'on relise 1 Timothée 3, 1-7 et Tite 1, 7-9. L'essentiel y est dit, même si certains aspects du langage employé appellent une "traduction" en termes d'aujourd'hui. Sans doute n'est-il guère à craindre que l'évêque choisi se livre à la boisson et aux rixes ; toutefois, s'il était de nouveau l'homme d'une seule femme, comme le préconise l'auteur de l'épître, la question du célibat des prêtres serait réglée ipso facto. Ces passages néo-testamentaires ont ainsi la grande vertu de nous montrer toute la relativité des choses ecclésiales, en principe difficiles à couler en force de loi divine ou assimilée ...

Tout en souhaitant qu'un nouvel évêque ait les qualités humaines, pastorales et spirituelles sur lesquelles tout le monde est d'accord, et en rappelant que nobody is perfect, il me semble que la conjoncture actuelle appelle un évêque doté de qualités "politiques". C'est-à-dire quatre choses :

- le courage de mettre un chantier la création d'un diocèse correspondant à la Région de Bruxelles-Capitale ;

- redonner aux catholiques francophones la place qui devrait être la leur dans la pensée et la conduite pastorales de l'Église bruxelloise, ainsi que dans la gestion centrale du diocèse ;

- commander un audit externe de la situation financière de l'Église diocésaine, pour évaluer les rapports de force qui s'y jouent, en corriger les injustices, rétablir l'équité et veiller au bien commun au prorata de besoins différenciés (cf. 1 Timothée 3,5 : c'est bien "l'économie" qui est en jeu) ;

- arrêter de "tirer sur la corde" en maintenant une géographie paroissiale périmée - nonobstant les essais bricolés de restructuration -, c'est-à-dire : repenser à frais nouveaux la pastorale en fonction de l'évolution multi-nationale, multi-culturelle et multi-religieuse de la ville de Bruxelles. Il faudrait pour cela, dans la meilleure des hypothèses, lancer la démarche d'un véritable synode diocésain pour l'Église de Bruxelles.

Vu ces quatre points, mon attente porte sur un évêque qui ait le sens de la "conduite des affaires". Conduire ne signifie ni brutaliser, ni prendre la posture de l'inspiré. Au contraire, cela exige des facultés d'écoute, de parole, de concertation et de diplomatie peu communes ; surtout, cela demande la capacité de décider, et d'assumer les risques des décisions prises. Dans le cas d'un évêque, cela demande autant de proximité envers ses fidèles, que de saine et libre distance vis-à-vis du pouvoir romain.

Bernard Van Meenen, prêtre à Bruxelles

* * *

2. Une femme "cardinale"

Sachant qu’il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, je souhaiterais que les chrétien(ne)s de Belgique, en particulier les membres de PAVES et de Démocratie dans l’Eglise, sollicitent de Rome la désignation d’une femme Cardinale en Belgique.

A l’origine, il y avait des Cardinaux Evêques, des Cardinaux prêtres et des Cardinaux diacres. C’est ainsi qu’il y eut des Cardinaux mariés, mais pas de femmes, pourtant éligibles. Depuis le 20e siècle, la pratique s’est introduite de nommer tous les Cardinaux Evêques, ce qui requiert qu’ils soient prêtres et exclut les femmes. C’est là une pratique récente, qui n’a aucune raison d’être immuable.

On peut certes militer pour l’ordination des femmes, que je souhaite vivement. Mais c’est là une réforme beaucoup plus profonde que l’accession de femmes (diacres) au Cardinalat. Cette accession constituerait un premier pas naturel pour atténuer l’inégalité de genre dans l’Eglise.

Moins d’inégalité de genre dans l’Eglise est important, non seulement pour la vie interne de l’Eglise, mais aussi et surtout peut-être en raison de l’influence morale du Catholicisme dans le monde, en particulier le tiers-monde. Les spécialistes du développement soulignent l’importance cruciale de l’émancipation de la femme dans le processus de développement. Dans une grande partie du tiers-monde (pensons à l’Amérique Latine), l’Eglise catholique est une référence morale majeure. Sa pratique inconditionnelle de l’inégalité de genre est stigmatisée par les spécialistes comme un frein au développement. C’est déplorable, et constitue un enjeu qui va bien au-delà de la vie interne de l’Eglise.

C’est pourquoi j’invite les chrétien(ne)s de Belgique porteurs d’espérance à solliciter de Rome la désignation d’une femme Cardinale en Belgique. Les candidates amplement qualifiées ne manquent pas… Merci pour votre attention à cette invitation, que je souhaiterais vous voir joindre à l’expression de vos espoirs concernant la succession de Mgr Danneels.

Jacques Drèze

* * *

3. Lorgner vers la France !

Je pense qu'il serait opportun de gagner du temps, et de demander en conséquence à l'intéressé de prolonger quelque peu son mandat.

1/ L'Eglise (de Belgique dans le cas présent) n'est pas mûre pour prendre ses responsabilités. Et il faut arrêter de laisser Rome décider à l'aise sans consulter le peuple de Dieu.
Mais comment ? Transposer les modes de scrutin démocratique du monde politique dans l'Eglise n'est pas imaginable et ce n'est d'ailleurs pas un modèle à imiter !!!
Il y a un travail de sensibilisation et de préparation intense à mener et on n'est nulle part.
Il est temps néanmoins de faire savoir à la magistrature (pardon, je veux dire au magistère) que des chrétiens plus éveillés à leur mission et à leur responsabilité sont demandeurs d'une recherche dans le sens de la participation des communautés au choix de leurs pasteurs. Et qu'une recherche doit être menée d'urgence dans ce sens : à la fois en cherchant un retour aux sources (cfr Eglise primitive) et une adéquation la meilleure possible au monde moderne.
2/ Dans le cas de l'Eglise de Belgique, il serait triste, bête et idiot de mettre en place un nouveau président d'une conférence épiscopale belge, alors que le bon sens indique que le pays ne survivra sans doute pas à l'année 2009 et sûrement pas plus de cinq ans au mieux.
D'autre part je ne suis pas demandeur d'une multiplication des cardinaux et archevêques. Diviser la conférence épiscopale en deux (francophone et flamande) serait choquant. Diviser n'est pas une idée bien chrétienne et multiplier les archevêchés, n'est pas logique alors que nos prêtres sont de moins en moins nombreux et qu'on a tendance à supprimer des doyennés.
Logique de faire de même au niveau des archevêchés.
Laissant à la Flandre le soin de prendre ses propres décisions, je suggère (et demande) que nos diocèses francophones soient simplement reliés aux archevêchés français les plus proches. Soit nos quatre évêchés francophones avec Reims; soit Tournai et Bruxelles (l'Eglise francophone de Bruxelles avec Lille) et Namur & Liège avec Reims.
Utile de renforcer nos liens avec l'Eglise de France, alors que ceux-ci sont déjà habituels et vitaux en matière de media notamment, de pastorale liturgique aussi. Mais surtout à l'instar des liens qui vont sans doute se régénérer au plan politique, si la Wallonie et Bruxelles ont la sagesse de chercher l'union (regroupement avec notre patrie d'origine) plutôt que la fragmentation et la division, si de petits esprits voulaient prétendre mener l'expérience d'une Wallonie indépendante, lorsque nos amis flamands vont sans délai nous donner notre congé (en termes clairs : nous "foutre à l'huche", si nous n'acceptons pas d'être proprement colonisés.

Paul Lemaire


Pierre Collet (Hors-les-murs)


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