Prêtres mariés ou ex-prêtres? : le débat reste ouvert …
Pierre Collet
Publié dans HLM n°113 (9/2008)
‘Prêtres mariés ou ex-prêtres ?’ Posée de cette manière dans notre dernier bulletin, la question était-elle pertinente ? Je le croyais sincèrement mais je n’en sais rien, sauf qu’elle a suscité quelques réactions dont celle qui suit, une sorte de retournement de la question qui n’a pas manqué de nous interpeller, et un débat dans une réunion internationale qui m’oblige à y consacrer ces quelques lignes.
J’avais pris quelques précautions en envisageant qu’au moins des perceptions plus ‘subjectives’ ou plus ‘objectives’ étaient possibles, et je m’étais risqué trop audacieusement sans doute dans le monde des idées, des théories, de la théologie… : il en faut de temps en temps quand même ! Mais tentez donc l’expérience inverse en demandant, par exemple aux prêtres de votre entourage : « qu’est-ce que c’est, un prêtre ? » Gageons que vous causerez un certain embarras, ou qu’au moins vous serez surpris de la diversité des réponses, voire du contenu de certaines.
Pendant la dernière rencontre des délégués de la fédération européenne des prêtres mariés, il y a deux mois, nous avons eu l’occasion d’échanger quelques heures là-dessus, et il nous est apparu assez clairement que c’était sa dimension ‘relationnelle’ qui permettait de dire quelque chose de l’identité du prêtre. Autrement dit qu’être prêtre n’a pas de sens en dehors d’une relation à une communauté. Cette affirmation qui est bien dans la ligne d’une conception ‘fonctionnelle’ des ministères et qui recouperait facilement Kerk en Ambt des dominicains hollandais finit-elle par devenir banale ? Peut-être, et malheureusement car on en est encore bien loin sur le terrain du fonctionnement de nos églises locales. Mais lors de cette réunion européenne, aucun d’entre nous en tout cas ne pouvait même imaginer qu’il pourrait en être autrement, par exemple par une sorte de statut ou de ‘pouvoir’. J’entends encore le délégué espagnol nous l’expliquer de cette manière : « C’est quand quelqu’un d’autre ou une communauté me reconnaît comme prêtre que je le suis. Sinon je ne le suis pas… »
Bien sûr, cette manière de voir les choses n’est certainement pas partagée par tout le monde, et beaucoup préféreraient sans doute qu’on puisse se fier à des rôles bien définis, bien ‘établis’, immuables et sécurisants. Mais ce n’est qu’un leurre qui permet de maintenir les choses en l’état et de préserver les pouvoirs, et ce n’est certainement pas ce que nous ressentons quand nous lisons les évangiles… Et donc au lieu de tenter de nous dire à partir de nous-mêmes, de façon un peu égocentrique et en tout cas ‘institutionnelle’, ne serait-il pas plus ‘juste’, de le faire à partir des autres ?
La piste que nous suggère ci-dessous Michaël Singleton est un peu différente, et fait plutôt appel à la catégorie du ‘temps’ : au lieu de nous ‘définir’ à partir de notre passé et de notre histoire, ne pourrions-nous (aussi) essayer de le faire à partir de notre avenir, de nos projets… ? D’où le titre explicite de son témoignage : fidélité au futur !
Il me semble qu’il y a des convergences dans toutes ces réactions, et elles ont quelque chose à voir avec un décentrement, une altérité, une sorte de regard qui vient d’ailleurs… Convergences aussi avec un vieux numéro de HLM sur ce thème de ‘la fidélité’ - ‘une question de foi…’ - où nous citions entre autres un petit livre de Pierre de Locht à ne pas oublier[1]. Mais d’autres approches, plus différentes, sont sans doute possibles et mériteraient d’être ici entendues : nous serons heureux de les recevoir…
Pierre Collet (Hors-les-murs)
Notes :
[1] Les
risques de la fidélité, CEFA, 1977, 99 pages, in HLM n° 39, 1990.
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