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L’unité des chrétiens dans le monde de ce temps

Philippe Brand
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L’Eglise catholique est bouleversée par la levée d’excommunication d’un groupuscule d’intégristes lefebvristes, à qui aucune exigence n’a été posée sur l’application du Concile Vatican II, et par leur éventuelle réintégration.

Et ceux qui sont partis sur la pointe des pieds ?

Pendant ce temps, elle ne se pose aucune question à l’égard d’autres brebis, parties sans créer un schisme, ni consacrer des évêques, sur la pointe des pieds, à force d’être marginalisées, méprisées ou exclues. Ces centaines de milliers de chrétiens dans notre pays, des dizaines de millions dans le monde au moins, ont été enthousiasmés par le renouveau de l’Eglise dans son rapport au monde moderne impulsé par le Concile Vatican II ; ils souhaitent ardemment, encore aujourd’hui, pour certains quarante ans après leur mise sur la touche, l’application de ce Concile.

Les vraies priorités

Les problèmes posés à la conscience de tous les humains sont cruciaux : la famine, la misère d’un milliard d’êtres humains, l’inéquité de la répartition des richesses, la mutation climatique en cours, les risques sanitaires causés par des milliers de substances chimiques ou le nucléaire, la dilapidation des énergies fossiles au profit de quelques générations, la destruction d’emplois, le chômage de masse, les guerres, les conflits de civilisations et de religions, etc… Ils font souffrir et tuent des millions d’êtres humains, pour nous des enfants de Dieu, et mettent en danger de mort la nature, œuvre de Dieu.

Devant de tels enjeux, les problèmes de juridisme de rite liturgique, de tradition, de discipline ecclésiastique apparaissent dérisoires. La seule question qui vaille est de rechercher l’union avec les six milliards d’humains pour lutter contre ces fléaux, sauver l’humanité et la planète qui la porte. Pour les chrétiens, la seule interrogation est de savoir comment la lumière de l’Evangile peut éclairer leurs choix individuels et les mouvements collectifs qui exercent une pression sur les décisions des responsables politiques. L’unité à promouvoir, c’est la fidélité à ces objectifs d’avenir de l’humanité, et l’harmonie dans ce but avec tous les hommes, croyants de toutes obédiences et incroyants.

Des chemins de traverse en fidélité à l’Evangile et à Vatican II

De nombreux catholiques ont emprunté des chemins de traverse par rapport à une Eglise centrée sur elle-même, tournée vers le Concile de Trente, quatre siècles en arrière, et non vers la seule tradition de référence, celle de l’Evangile.  Une grande partie d’entre eux ont centré leur vie sur ces enjeux d’humanité : justice à l’égard du Tiers-Monde, présence aux pauvres de notre société, utilisation limitée des ressources de la nature, combat pour la justice sociale et la paix entre les peuples, rapprochement des civilisations, etc…

Ainsi, ils sont fidèles à l’Evangile et au Concile Vatican II, qui demande qu’ils « s’appliquent de toutes leurs forces à obtenir que les biens créés soient cultivés dans l’intérêt d’absolument tous les hommes, selon les fins du Créateur, grâce au travail de l’homme, à la technique et à la culture dans la cité, que ces biens soient mieux distribués entre les hommes et qu’ils s’acheminent selon leur nature à un progrès universel dans la liberté humaine et chrétienne. » (Constitution « Lumière des nations »)

Des chrétiens rejetés, abandonnés,  ignorés

Ces chrétiens, enfouis dans la masse des hommes ne sont pas organisés pour exercer un pouvoir dans la société Eglise, se faire reconnaître collectivement, influer sur les lignes directrices. Quand ils l’ont, par exemple dans le mouvement des communautés de base en Amérique du Sud, ils ont été marginalisés, rejetés, sanctionnés, cassés par Rome. Ainsi, l’évêque successeur du prophète Dom Helder Camara a été choisi parmi les plus réactionnaires possibles, pour tenter de réduire à néant son rayonnement. Sur eux, tombent les exclusions définitives, qui ne sont suivies d’aucune proposition de retour à la communion... Deux poids, deux mesures...

Une Eglise institution hors du monde des hommes

L’institution Eglise, par souci de se mettre en position de concurrence favorable avec les autres religions, est à la recherche d’identité collective visible ; elle se raccroche à des marqueurs simples qui flattent ceux qui aspirent à cette visibilité : la liturgie traditionnelle, les rassemblements, les repères identitaires identiques depuis les siècles où elle s’imposait dans la société. Elle reste dans sa bulle, protégée des réalités de la vie concrète, elle ne sait pas accueillir la novation apportée par l’histoire. Elle cherche ses soutiens dans des mouvements souterrains, tel l’Opus Dei, fondés sur l’obéissance, l’ordre, la discipline, la connivence avec les puissants et les dictateurs. 

Elle se sépare, sans état d’âme, de toutes les forces vives qui luttent en accueillant les dynamismes collectifs pour un progrès de l’homme en humanité. C’est la tradition des tout premiers siècles, au temps de Saint Irénée : «  La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant ».

Des forces vives de résistance dans la société et l’Eglise

Depuis quelques dizaines d’années, dans les sociétés civiles du monde entier, des mouvements de masse s’agrégent, toujours plus nombreux, pour lutter contre les privilégiés cramponnés à toujours plus de profit, contre les pouvoirs aveugles et autoritaires. L’opinion publique mondiale est en train de naître et de peser sur les événements. A la faveur de la crise, les prétendues utopies du mouvement altermondialiste, telles que l’impôt mondial de redistribution et la lutte contre les paradis fiscaux, sont en train de prendre corps.

Les chrétiens attachés à l’Evangile et au Concile Vatican II se fédèrent, par exemple en Europe francophone dans les « Réseaux des Parvis ». Ils deviennent une force collective pour être respectés par la hiérarchie, être reconnus comme une voix dans l’Eglise et faire reconnaître par cette institution les vraies priorités de notre temps. 

Ils participent ainsi à l’immense combat pour l’homme dans cette période cruciale de l’humanité, qui peut en sortir anéantie ou renouvelée. Ils contribuent avec les outils de la raison commune, à la réflexion sur les enjeux vitaux et les moyens les plus adaptés à mettre en oeuvre. Ils y rayonnent de la lumière de l’Evangile, fondée sur l’amour d’autrui, élément essentiel de la cohésion sociale et mondiale. Ils participent à cette dynamique avec d’autres éclairages spirituels, y compris laïcs, pour composer, ensemble, un feu d’artifice qui éclaire la route commune.

Ils se sentent en résonance avec tous « les hommes de bonne volonté ». Ils ont besoin d’apprendre à se rassembler plus efficacement, de faire entendre mondialement leur sensibilité, pour relativiser les prises de position d’un autre âge de l’appareil institutionnel de l’Eglise, et faire apparaître le vrai visage de l’Evangile. Ensemble les sans-culottes de l’Eglise et les sans-culottes de la société pourront humaniser la marche du monde.



Philippe Brand - France)

Notes :
Philippe BRAND, auteur de "Des prêtres épousent leur humanité. 24 témoignages de prêtres mariés",  Ed. L’Harmattan, avec 5 des auteurs de témoignages de ce livre - 26/03/09

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