La réunion 2010 du comité de la Fédération européenne des prêtres mariés
Pierre Collet
Publié dans HLM n°121 (9/2010)
Comme d’habitude, le groupe coordinateur de la Fédération Européenne de Prêtres Catholiques Mariés a tenu sa rencontre annuelle à Bruxelles au début du mois de juillet. L'expérience des dernières années nous permet d'affirmer que c’est une bonne façon de maintenir les contacts, d'échanger et de travailler ensemble sur les sujets qui nous concernent tous par-delà les frontières.
Nous avons partagé deux jours de travail et de réflexion avec les délégués des groupes d’Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Italie et Royaume-Uni : en tout 13 personnes. Une agréable visite guidée du centre de Bruxelles nous a aussi été offerte par Jean-Marie Culot, fin connaisseur de l’histoire de la capitale et pédagogue aguerri, et nous nous sommes offert le luxe de partager un souper sur la Grand Place!
Une bonne partie du travail avait été bien préparée : chaque groupe national avait dû élaborer un document de travail sur l’un des points à l’ordre du jour et l’avait envoyé à temps pour permettre une réflexion préalable.
Mais la première de nos préoccupations consistait à faire le point sur l’évolution des groupes de prêtres mariés en Europe depuis un an. Il n’est évidemment pas question de décrire ici dans le détail la vie et les actions de tous ces groupes : contentons-nous d’en rapporter quelques éléments plus significatifs et parfois concordants.
Et la constatation la plus évidente paraît bien être que nous commençons tous à vieillir dangereusement... Chaque année, nous commençons par évoquer tous ceux qui nous ont quittés ou qui ont dû se mettre en retrait pour raisons de santé : c’est particulièrement significatif pour le groupe allemand qui a perdu cette année deux de ses principaux piliers, pour le groupe italien depuis le retrait de son président pour raison de santé, pour un groupe français qui a connu plusieurs décès, ainsi que pour le groupe britannique. Et la relève n’est pas assurée, on en parlera plus loin.
Pourtant, nous avons été impressionnés par la vitalité du groupe espagnol qui parvient encore à réunir une centaine de ses membres pour tout un week-end et dont le site web et la revue trimestrielle continuent à être d’une qualité exceptionnelle. Le groupe prépare d’ailleurs la publication d’un livre de témoignages qui devrait être différent de ce qu’on connaît déjà : on y reviendra. Nous avons aussi salué les initiatives prises par le groupe autrichien qui se réunit tous les mois pour une célébration et un repas commun. Pendant la Semaine Sainte, il a pris l’initiative d’une liturgie de pénitence à la suite des scandales de pédophilie et cette célébration a connu une participation importante. Le groupe se sent impliqué dans un mouvement global de ‘purification ecclésiale’, face aux nombreuses renonciations de croyants à leur appartenance catholique et donc à leur contribution à l’impôt dédicacé.
Ce qui nous a frappés lors de ce tour de table, c’est le lien de plus en plus étroit qu’entretiennent les groupes de prêtres mariés avec les réseaux nationaux, par exemple en Espagne, en Autriche, en Belgique, au Royaume-Uni, ou en Allemagne au récent Kirchentag. Parfois aussi avec les communautés de base, plus particulièrement en Italie, en Espagne, en France, en Autriche, ou même en Belgique avec l’existence de cette revue.
Depuis un an, tous nos groupes ont été beaucoup interpellés par les médias dans le cadre des deux événements qui ont secoué l’Église catholique et qui, curieusement, concernent tous deux le statut de son clergé : l’accueil des prêtres anglicans mariés et les abus sexuels commis par des prêtres. Si le recours des médias à notre opinion et à notre expérience est évidemment bien compréhensible, il n’en reste pas moins que notre réponse doit être la plus pertinente possible. Nous avons déjà publié ici, en décembre 2009, notre prise de position sur l’affaire des Anglicans et nous avons continué à l’affiner. Mais la question de la pédophilie dans le clergé nous touche bien plus encore, comme toute l’opinion publique, et il nous a fallu souvent réagir à l’affirmation abrupte : tout ça n’arriverait pas si les prêtres pouvaient se marier… Pour donner une réponse nuancée à cette question, nous avons discuté une analyse préparée par Ramón Alario, le délégué espagnol, et nous espérons publier le résultat de notre travail dans le prochain numéro.
Le Comité s’est aussi penché sur deux questions plus liées aux objectifs propres de la Fédération, celle du statut social des prêtres mariés en Europe – et là le travail de recherche d’informations se poursuit – et celle du manque d’intérêt suscité par nos groupes chez les prêtres récemment sortis. L’analyse nous a semblé difficile, mais nous avons émis trois hypothèses : la première tiendrait à notre propre fonctionnement, à notre âge, à nos habitudes et à notre manque d’attention : une question de générations aussi ; la seconde mettrait en cause des défauts de communication, en particulier sur le fond : depuis toujours, on nous a reproché d’être des nostalgiques et des revendicateurs… ; la troisième incriminerait chez les plus jeunes une formation et un exercice du ministère de plus en plus individualistes, produisant à leur départ un désintérêt très marqué pour les affaires d’Église : contrairement à beaucoup d’entre nous, ils n’ont pas été portés par l’élan d’un concile ! Vos avis sont les bienvenus…
Pierre Collet (Hors-les-murs)