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Un fonctionnement démocratique d’Eglise, Bonne nouvelle pour les pauvres ?

Gerda Compère-Hilgers
Publié dans Bulletin PAVÉS n°16 (9/2008)

Toute sa vie, Jésus a épousé la cause des pauvres. En cela il s’inscrit dans la lignée des prophètes du Premier Testament. Un des signes qu’il donne de la présence de Dieu, c’est que la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres. L’option prioritaire (plutôt que préférentielle : cf. Ignace Berten, « Lumière et Vie » 177, p. 75) est constitutive de l’Eglise du Christ : si l’Evangile n’est pas d’abord annoncé aux pauvres, alors nous n’annonçons pas le bon Evangile à tous les hommes.

Encore récemment, Mgr Daucourt, évêque de Nanterre, interpellait les baptisés de son diocèse sur la place qu’ils font aux pauvres dans leur vie. Il y va de la crédibilité du message. « Donner une priorité aux pauvres, c’est une exigence d’Evangile. Donner une place centrale aux pauvres dans nos communautés et accueillir leurs richesses, c’est constituer une Eglise qui, obéissant à la parole de Dieu, tient ses membres plus faibles pour nécessaires ». C’est sur la qualité de notre relation aux personnes en situation de détresse que nous serons jugés (Mt 25, 40).

Quand Jésus nous dit « c’est à moi que vous l’avez fait », il nous indique un chemin pour le rejoindre. La question de l’identité du Christ n’est pas d’abord une question spéculative sur son être mais un chemin proposé à ceux qui veulent le suivre et découvrir la source de son être, celui qu’il appelle « Père ». Toute sa vie, jusqu’à sa mort, Jésus nous révèle, en paroles et en actes, un Dieu sorti de lui-même pour épouser la condition humaine dans ce qu’elle a de plus précaire et annoncer la libération universelle des pauvres et des opprimés.

Dans la situation actuelle, les croyants sont-ils organisés en Eglise pour faire que l’Evangile soit une bonne nouvelle pour les pauvres ? Quelle organisation alternative de nos communautés et de l’institution dans son ensemble donnerait enfin aux pauvres la place que Dieu leur donne depuis toujours ? Précisons qu’il s’agit bien ici de pauvreté matérielle (nous n’ignorons pas qu’il est d’autres détresses) mais la pauvreté évangélique ne peut être ramenée à une simple spiritualité ou à une attitude de démission mystique devant les affaires humaines. Nous sommes convaincus qu’un fonctionnement démocratique des structures institutionnelles de l’Eglise devrait permettre à tous, et prioritairement aux plus démunis, ceux qui croient n’avoir rien à apporter ou à dire, de participer activement à la construction du Royaume de Justice. Ceci implique des structures qui permettent à tous de participer activement à la gestion et aux orientations de leurs communautés. Les pauvres trouvent-ils dans les communautés chrétiennes des espaces de collaboration où leur expérience est prise au sérieux, où ils sont en mesure de faire valoir leur regard sur les réalités, de faire entendre leurs questions et leurs réflexions souvent très différentes des idées bien intentionnées de ceux qui ne sont pas passés par où ils sont passés ? Quand il s’agit de comprendre comment aider à sortir de la pauvreté, les pauvres ont une compétence dont il faut tenir compte. On ne peut bâtir la justice sans leur donner la parole et les écouter.

Que ceux qui croient n’avoir rien à dire, rien à donner, tout à recevoir, trouvent dans nos communautés des gens qui croient en eux, qui ont la patience des guidances et accompagnements pour les aider à devenir créatifs et actifs, bien qu’ils soient privés de beaucoup de choses qui font le sel de la vie des autres. Dans un monde où la dualisation va croissant, un des grands enjeux pour l’Eglise est de retisser des liens humanisants, de refuser que la pauvreté soit une fatalité inéluctable et de s’engager comme une force sociale dynamisante au nom de l’Evangile.

- Quel « cheminement catéchétique » est susceptible d’engendrer des croyants qui acceptent de repenser Dieu à partir de ce que les pauvres nous disent de Lui ?

- Quelle « diaconie » mettre en place en vue d’une redistribution des avoirs (matériels, culturels, sociétaux,…) qui prendrait au sérieux les recommandations de Vatican II (Constitution « L’Eglise dans le monde de ce temps ») ?

- Quelle liturgie célèbrerait dignement la joie de Dieu d’être accueilli comme bonne nouvelle et don gratuit à ceux qui manquent de tout ?

- Quelle manière d’exercer le pouvoir traduirait fidèlement le service réciproque commandé par Jésus : « Vous devez vous aussi vous laver les pieds les uns aux autres » (Jn 13, 14) ?

- Quelle conversion faut-il pour que la hiérarchie de l’Eglise cesse de voir les pauvres comme menace quand ils osent parler de libération et dénoncer l’injustice structurelle qui les écrase ? Helder Camara disait : « Quand je donne à manger aux pauvres, on dit que je suis un saint, mais quand je demande pourquoi ils sont pauvres, on m’accuse d’être communiste ».

- Quand, dans nos célébrations festives, les marginaux, les exclus, les SDF, les sans-papiers se sentiront-ils chez eux, à égalité avec tous, comme un peuple de frères autour d’un Père qui veut leur bonheur ?

Ces questions dessinent un horizon d’espérance sur lequel se profilent des microréalisations qui sont autant de jalons vers le Royaume, déjà là mais toujours à construire. Notre tâche consiste à en lire les signes autour de nous et partout dans le monde. Nous serions heureux de recevoir de la part de nos lecteurs des témoignages en réponses à nos questions et nous les en remercions d’avance.

Gerda Compère-Hilgers (Communautés de Base)


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